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Maître Secret - Memphis-Misraïm

Maître Secret

4e degré du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm

Le grade de Maître Secret est souvent considéré comme le premier des Hauts Grades de la franc-maçonnerie. Cependant, il serait plus juste de le voir comme une continuité naturelle du grade de Maître, lequel pourrait ainsi être reconnu lui-même comme le véritable premier Haut Grade. En effet, Maître Hiram est mort et le Frère, bien qu’ayant été reçu aux mystères sacrés du mythe, se retrouve avec la frustration de n’avoir pu retrouver ni la Parole Sacrée du Maître, ni même les Compagnons félons qui se sont enfuis, se soustrayant ainsi au châtiment naturel auquel les exposait cet acte de trahison et de meurtre de Maître Hiram. Enfin, l’ultime frustration étant que le chantier n’est point terminé, que l’œuvre n’est pas encore accomplie, et qu’il n’y a plus personne, apparemment, pour indiquer la Voie…

Ainsi le grade de Maître maçon se termine-t-il, d’un point de vue « mythique » comme une histoire incomplète qui appelle une suite. En décomposant le mythe en ses éléments constitutifs, celui-ci s’affirme implicitement comme une triple promesse faite au Frère qui décidera son entrée dans l’Ordre maçonnique des Hauts Grades.


Première promesse

La première promesse est celle de la vengeance de Maître Hiram et de la justice rendue aux meurtriers du Maître qu’il va d’abord falloir poursuivre, retrouver et juger.

Seconde promesse

La seconde est celle de la construction du Temple qui doit se poursuivre. Pour y parvenir, il faudra retrouver les secrets de construction partis dans la tombe avec Maître Hiram, mais aussi trouver le secret de leur mise en œuvre, lequel renvoi à la notion d’opérativité par trop souvent étrangère aux frères, quel que soit leur rite d’ailleurs.

Troisième promesse

La troisième promesse du grade de Maître, la plus mystérieuse, consiste en la redécouverte de la parole perdue de Maître Hiram, car le véritable mot des Maîtres est un mot de pouvoir pour celui qui le découvre et sait le prononcer. Celui des maçons est un mot substitué et donc le Maître-maçon n'en est pas vraiment un...


Les grades ayant comme support le thème de la recherche des meurtriers d’Hiram, de leur jugement et de leur exécution, pourraient être rassemblés dans la catégorie qualifiée de « maçonnerie noire ». Véritable maçonnerie de combat selon Robert Ambelain, mais aussi le support d’une véritable maçonnerie « occulte » dans le sens où ces grades constituent l’accès à une maçonnerie très spéciale conférée en dehors de l’échèle ordinaire du rite mais propre au rite de Memphis-Misraïm. Le noir n'est donc plus le symbole de la vengence mais celui du caractère "occulte" et "caché" de la "vraie" franc-maçonnerie.

Les grades supérieurs ayant comme support symbolique mythique la reconstruction du Temple, ou son exploration, la réalisation de plan ou de monuments, pourraient être rassemblés dans une catégorie qualifiée de « maçonnerie blanche ».

Aigle noir et blanc memphis misraimA la première correspond la destruction des formes, à la seconde la construction de nouvelles formes ; la force centripète, la force centrifuge ; Seth qui éparpille le corps démembré de son Frère Osiris, Isis qui en rassemble les morceaux. Ce sont les deux facettes de la vie et de son cycle éternel de naissance et de mort, Solve et Coagula. Voilà un aspect de l’ésotérisme des ailes de l'aigle blanc et noir au rite de Memphis-Misraïm expliqué dans l’un de ses mystères…

Enfin, à la dernière catégorie n’est pas conférée de couleur car nous nous trouvons ici dans un interstice, ni blanc ni noir, ni construire ni détruire, ni centrifuge ni centripète. Ce grade est tout intérieur sans être dans l’action ou l’inaction. C’est à cette derrière catégorie qu’appartient le grade de Maître Secret du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm.

La légende du grade de Maître Secret

Après la mort d’Hiram, les Maîtres sont contraints de poursuivre l’édification du Temple. Privés de leur guide, les Maîtres Secrets comprennent que pour raviver l’esprit du Maître, il va s'agir d'incarner pleinement les préceptes maçonniques, qualifiés en la circonstance comme la poursuite du devoir poussé jusqu’au sacrifice. Certains pourraient y voir une lointaine reformulation du message christique, mais l'idée est cependant plus subtile et profonde.

Réunis dans le Saint des Saints, auprès du corps d’Hiram, les Maîtres pleurent sa perte. Cet événement tragique rend impératif la préservation du secret maçonnique et de son héritage spirituel. C’est dans ce contexte que le grade de Maître Secret est institué.

Désireux de sauvegarder les enseignements sacrés et le mystère de la Maîtrise, le roi Salomon choisit un cercle restreint de Maîtres dont la vertu, la sagesse et l’intégrité les rendent dignes de confiance. À ces hommes d’exception revient l’honneur et la lourde responsabilité de veiller sur la sépulture d’Hiram, garantissant ainsi la transmission du savoir et la protection de son héritage contre toute profanation. Gardien de la mémoire et de la connaissance, le Maître Secret devient le veilleur infatigable d’une vérité transcendante.

Mais il s'agit là de paroles descriptives creuses du grade dont les significations n'ont en réalité aucune application concrète. Tout cela permet d'éviter de remarquer l'existence d'un curieux paradoxe que devra résoudre le Maître maçon pendant sa quête : Que peut-il bien y avoir à garder ici ? Il ne reste plus que le corps inerte du Maître et la Parole est perdue, sur quoi veillent véritablement les Maîtres Secrets ?

L’ésotérisme du grade de Maître Secret au rite de Memphis-Misraïm

Mais à l’exotérisme du message « moral » succède son ésotérisme, véritable lumière non verbale produite par l’étreinte subtile de l’âme humaine avec le corps du « rite ». Et c’est en cet ésotérisme que le paradoxe relevé précédemment trouve sa résolution. Gardons seulement à l’esprit que le Saint des Saint est un lieu Traditionnel où il est exclu qu’un cadavre puisse être déposé, fut-il celui de Maître Hiram. Dès lors, le Maçon curieux se demande :

Quelle est la véritable nature de Maître Hiram ? Celui-ci ne serait-il pas autre chose qu’un corps dont la chair se détache ? Le corps d’Hiram renferme-t-il autre chose ?

L’étrange clé qui est confiée au Maître Secret pendant sa réception, fait de la même matière que la porte sans serrure des premiers grades, ne lui permettrait-elle pas d’ouvrir le coffre du corps de l’Homme, dans lequel gît, inerte la Puissance originelle de l’Univers tout entier ? La légende d’Hiram, trouverait là un véritable bénéfice à être expliquée à travers la légende d’Osiris et de sa mystérieuse résurrection.

Mais sorti du contexte symbolique et philosophique, ce grade représente une sorte de sas. Il ne s’y passe rien et en cela, il constitue une sorte d’hapax existentiel, situé entre le « faire » des grades précédents, et un avenir spirituel qui n’est pas encore actualisé en lui. Il est rempli de de préceptes mais il est dépourvu d’action. En cela, le Maître Secret apparaît comme un grade complètement « intérieur », comme l’était, d’une autre façon, le grade d’apprenti. Le Maître Secret se trouve donc entre deux mondes, comme il l’était dans le trajet le menant du cabinet de réflexion à l’entrée du Temple pour sa réception au grade d’apprenti maçon…

De l'Opérativité possible du Maître Secret

Pour résumer, il est ici question pour le Maître Secret de faire revivre Hiram par la pratique du devoir poussé jusqu’au sacrifice, mais en quoi consiste ce devoir et surtout, comment rendre opératif ce concept ? Peut-être faut-il rappeler cette phrase extraite du rituel :

« La vraie conscience de l’homme est une conscience libre. Elle se reconnaît au fait qu’elle est conforme à la Nature, dont jamais elle n’étouffe les tendances. »

L’ascèse du Maître Secret consiste donc à apprendre à faire taire en lui toutes les catégories de construction humaines (sociales, individuelles, ambitions de toute sorte etc.), de façon à ce que la conscience se déploie selon le « plan » originel à partir duquel elle fut émanée aux origines du monde, c’est à dire selon l’archétype de l’homme divin, la conscience à son état antéprédicatif. C’est là le sacrifice auquel le Maître Secret doit consentir : le sacrifice du bien et du mal, et plus largement de TOUT ce qui fait de lui un humain, afin que l’univers se montre à lui en sa nudité absolue et que, parvenu au paroxysme de l’expérience intérieure, saisit par un élan de lucidité totale, l’esprit s’y reconnaisse lui-même comme la source de ce TOUT. Il s'agit de la condition pour que la Parole soit retrouvée.

Il ne s’agit pas là d’une proposition philosophique, mais la plus positive des actions à réaliser concrètement. Pour cela, un travail méditatif approfondit de plusieurs semaines sur la notion d’impermanence pourrait être envisagé pour comprendre les enjeux ésotériques du Maître Secret. Il s’agit d’un travail qui n’est pas introspectif, il n’y a rien à chercher mais tout à « voir » et « observer ». Il s’agit d’apprendre à se mettre à nu par le « sacrifice » de toutes nos attentes et espérances au fur et à mesure qu’elles apparaissent en nous, au moment même de leur naissance, à chaque instant afin de ne conserver que ce qui reste quand tout s’est dissous dans le grand Rien de l’observation. La chair ayant disparue, il ne restera alors plus que ce qui n’est jamais né.

A chaque message maçonnique peut être décliné un travail opératif. Il pourra être d’ordre méditatif, d’ordre théurgique ou alchimique. Nous en donnerons à chaque fois les grandes lignes, les techniques pouvant être mises en œuvre étant d’un domaine différent et doivent pouvoir être adaptées en fonction de chaque sensibilité.